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gerontoprevention.free.fr
Conseils
de lecture
Ces articles sont parus dans la
revue NPG
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Dans cette
rubrique, nous vous proposerons régulièrement
une sélection d’ouvrages littéraires
(romans, policiers, essais, récits
biographiques, bandes dessinées…), dont la
publication n’est pas forcément
récente, mais qui ont tous un rapport avec la
médecine. A chacun d’y puiser
selon ses centres d’intérêts.
Conseil numéro 19 : Réanimation
Conseil numéro 20 : Révolte des vieux
Conseil numéro 21 : Maladie d'Alzheimer (2)
Conseil numéro 22 : Séries médicales
Conseil numéro 23 : Séries médicales (2)
Conseil numéro 24 : Génétique
Nous allons
aborder cette fois-ci le thème de la « génétique » à travers deux romans, l’un Islandais et l’autre
Français. Indridason est un auteur de polars aujourd’hui très connu qui a reçu
de nombreux prix, et Michel Houellebecq est devenu célèbre surtout par les polémiques
déclenchées par chacun de ses romans. Curieusement, alors que j’avais pensé rapprocher
ces deux ouvrages depuis plusieurs mois, les films qui en ont été faits sont
sortis la même semaine en France. Pour celui de Houellebecq, il a lui-même
réalisé l’adaptation cinématographique de son roman. Malheureusement, si le
livre n’était pas le meilleur de cet auteur, le film est encore plus mauvais.
Arnaldur Indridason
La cité des jarres
Points Policiers, 7 euros.
L’inspecteur Erlendur est flic à
Reykjavic en Islande. Un flic à l’ancienne, pas toujours de bonne humeur, mais
terriblement obstiné, un flic qui n’aime pas laisser une enquête sans en
connaître tous les tenants et aboutissants. Erlendur est toujours encadré par
ses deux seconds Sigurdu Oli et Elinborg. Cette fois il s’agit d’un vieil
homme, tué d’un coup de cendrier sur la tête chez lui. On trouve chez la
victime la photo de la tombe d’une enfant de quatre ans, et sur son ordinateur,
des photos et des films pornographiques des plus immondes. Soupçonné de viol,
il s’en était tiré plus de 25 ans plus tôt, parce que le policier chargé de
l’affaire n’avait pas fait son travail. Alors l’inspecteur s’obstine à déterrer
de vieilles affaires dont, visiblement, personne ne veut se souvenir.
Erlendur est une espèce de Maigret
islandais. Ses partenaires lui font entièrement confiance même s'ils ne
comprennent pas souvent où il veut aller. Il se débat avec sa déprime, sa santé
moyenne (il fume et a des douleurs de poitrine) et ses relations conflictuelles
avec sa fille toxicomane, Eva Lind, qu’il ne comprend plus. Il vit aussi avec
le souvenir de son frère disparu enfant au cours d’une tempête de neige. Il est
d’ailleurs obsédé par les disparitions îliennes (sa bibliothèque est remplie de
livre uniquement sur ce thème) : comment peut-on disparaître sans laisser
de trace sur une petit île comme l'Islande ? Tout ceci au sein d’une
réalité islandaise très marquée par l’isolement, le poids de la famille et de
ses secrets.
Comme dans les autres romans
nordiques, ou dans les romans japonais ou chinois, il est toujours difficile pour
le lecteur francophone de se repérer dans les noms des personnages comme dans
les noms des villes. Par ailleurs, les auteurs nordiques donnent une vision
très pessimiste de leurs pays (Danemark, Finlande, Islande…) avec les problèmes
de saisons, de lumière, de temps et d’alcool qui semblent expliquer de forts
taux de suicide.
Le
terme de « Cité des Jarres »
fait référence à un endroit, il y a une
quarantaine d'années où étaient
conservés les restes des autopsies, afin de pouvoir effectuer si
nécessaire des
recherches ultérieures ou pour la formation des
étudiants. Ce système a été
modernisé grâce à la génétique.
L’intérêt médical de ce roman policier vient
de
ce fichier génétique qui a essayé
d’être implanté en Islande et le dénouement
de l’enquête fait bien sûr intervenir une maladie
génétique rare.
« La Cité des Jarres » a obtenu le prix Clé
de Verre du roman noir scandinave en 2002, le Prix Mystère de la critique 2006
et le Prix Cœur noir. Le film est sorti sous le titre « Jar City ».
Extrait :
« Erlendur
pensa aux recherches en génétique. Le Centre d’étude du génome avait récemment
commencé à rassembler les données sur les maladies de tous les Islandais,
décédés ou en vie, et à en constituer une banque contenant toutes les
informations sanitaires sur la population. On la croisait avec le fichier
généalogique qui permettait de retracer la filiation de chaque Islandais
jusqu’au Moyen Age, le programme s’appelait « Recherche sur le génome des Islandais
». Le but principal était de comprendre la manière dont les maladies se
transmettaient par les gènes, de les rechercher par le biais d’analyses et de
trouver des moyens de les guérir, elles ou d’autres maladies, si cela était
possible. On arguait du fait que la population islandaise était restée
longtemps isolée, que le sang n’avait pas été beaucoup mélangé, ce qui en
faisait un terrain de choix pour les recherches.
L’entreprise et le ministère de la Santé, qui avait délivré l’autorisation de constituer
un fichier informatique, avaient engagé leur responsabilité pour qu’aucune
personne étrangère ne puisse s’introduire dans la base et ils avaient exposé le
système très complexe de transcodage des informations, parfaitement impossible
à pirater. »
Michel Houellebecq
La possibilité d’une île
Le Livre de Poche, 7,50 euros
Sur la quatrième de couverture il n’y
a qu’une seule phrase : « Qui parmi vous,
mérite la vie éternelle ? ». Il est probable que l’éditeur a eu beaucoup de
mal à faire un résumé de ce roman et qu’il a préféré jouer la carte de cette
citation énigmatique et presque biblique, faisant probablement référence au
jugement dernier. D’ailleurs, les chapitres successifs de ce roman sont
intitulés « Daniel 1,1 » jusqu'à « Daniel 1,28 », ce qui constitue évidemment
une référence à la bible.
Le livre navigue entre le
« récit de vie », très actuel, mené par Daniel 1, un comique
spécialisé dans les sketches à scandales (sous les traits duquel on reconnaît
Michel Houellebecq lui-même), et l’exégèse dans un futur lointain (plusieurs
millénaires) de cette vie minable par Daniel 24 et Daniel 25, fruits des
manipulations génétiques mises au point par les Élohimites (une secte
ressemblant à celle des Raéliens et ayant supplanté les religions classiques). Daniel
1 connaît tout du fonctionnement de l'âme humaine, et c'est cette perception à
la fois cynique, désabusée et amorale qui lui permet de faire mouche à chaque
fois dans ses spectacles, ses films ou bien ses chansons parodiques. Désabusé
lui-même, le désir d'un ailleurs fini par le faire regarder avec intérêt et
bienveillance les concepts de la secte des Élohimites, dont l’auteur décrit
avec plus d'amusement que de critique le fonctionnement : son gourou
dominant sexuel, ses scientifiques convaincus et ses manipulations des adeptes qui
abandonnent tous leurs biens à la secte qui leur promet l'éternité. La secte
aménage à Lanzarote (une île des Canaries que Houellebecq affectionne
particulièrement) et avance sur le chemin de la vie éternelle en misant sur le
clonage des élus à partir de leur ADN. Lassé de son existence vide, sans
objectif et sans attache, Daniel 1 se suicide, ouvrant la porte à ses
réincarnations successives. Les clones de Daniel 1 vivent dans un monde déserté
(la majeur partie de la population est morte dans des catastrophes passées) où
il n'y a plus aucun contact physique…
Il faut signaler que si Michel
Houellebecq est excellent dans la critique de notre société (sexualité, monde
du spectacle, religions, sectes…), il fait (malheureusement) un très mauvais
auteur de science-fiction.
Ce roman de Michel Houellebecq a reçu
le Prix Interallié en 2005. Pour ce qui est du film, on peut dire que ceux qui
ont lu le livre risquent d'être très déçus, et que ceux qui ne l'ont pas lu
risquent de ne pas y comprendre grand chose.
Extrait :
« Un
être est façonné, quelque part dans la
Cité centrale, qui est semblable à moi ; il a du moins mes
traits, et mes organes internes. Lorsque ma vie cessera, l’absence de signal
sera captée en quelques nanosecondes ; la fabrication de mon successeur sera
aussitôt mise en route. Dès le lendemain, le surlendemain au plus tard, la
barrière de protection sera rouverte ; mon successeur s’installera entre ces
murs. Il sera le destinataire de ce livre.
La première loi de Pierce identifie la personnalité à la mémoire. Rien
n’existe, dans la personnalité, que ce qui est mémorisable (que cette mémoire
soit cognitive, procédurale ou affective) ; c’est grâce à la mémoire, par
exemple, que le sommeil ne dissout nullement la sensation d’identité.
Selon la seconde loi de Pierce, la mémoire cognitive a pour support
adéquat le langage.
La troisième loi de Pierce définit les conditions d’un langage non
biaisé.
Les trois lois de Pierce allaient mettre fin aux tentatives hasardeuses
de downloading mémoriel par l’intermédiaire d’un support informatique au profit
d’une part du transfert moléculaire direct, d’autre part de ce que nous
connaissons aujourd’hui sous le nom de récit de vie, initialement conçu comme
un simple complément, une solution d’attente, mais qui allait, à la suite des
travaux de Pierce, prendre une importance considérable. Ainsi, cette avancée
logique majeure allait curieusement conduire à la remise à l’honneur d’une
forme ancienne, au fond assez proche de ce qu’on appelait jadis
l’autobiographie. »
En ce qui concerne Arnaldur
Indridason, il existe 3 autres romans disponible en français (« La femme en vert », « La voix » et « L’homme du lac »), tous avec
l’inspecteur Erlendur, ses collaborateurs, ses souvenirs et sa fille toujours
toxicomane. A chaque fois on se replonge dans le passé à partir d’un thème
central : les violences conjugales, les enfants ayant un don, ou la guerre
froide. L’atmosphère y est toujours aussi sombre et oppressante.
Pour ce qui est de Michel Houellebecq,
pratiquement tous ses romans ont donné lieu à des films. On peut recommander
« Les particules élémentaires »
et « Plateforme ». Pour les
plus accros, il existe même un site Internet officiel : http://www.houellebecq.info/
Conseil numéro 23 [retour haut de page]
Voici donc
la deuxième partie de cette rubrique consacrée aux « séries médicales » à la télévision. Après « Urgences », « Grey’s anatomy », « Nip/Tuck » et « Docteur House », voici :
« Scrubs », « NIH », « ReGenesis », « Bones »
et « Diagnostic Meurtre ».
Bien sûr, cette liste n’est pas exhaustive, mais on peut considérer qu’il
s’agit des séries les plus connues et les plus originales. « Scrubs » et « Diagnostic Meurtre » se passent
aussi à l’hôpital, pour les autres séries les lieux d’action sont beaucoup plus
variés. « ReGenesis » montre
plus le travail de laboratoire (mais le héros principal est souvent sur le
terrain) et « Bones » est
très éloignée de la série médicale, mais le travail sur les squelettes
s’apparente beaucoup à celui des médecins légistes.
Scrubs
« Scrubs » ou « Toubib
or not Toubib » est une sitcom créée et diffusée depuis 2001 aux
Etats-Unis. En France, la série est diffusée depuis 2002 sur Paris Première et
depuis 2006 sur M6. Il y a actuellement sept saisons de tournées et une 8ème
est prévue. La chanson du générique de la série, « I am not a superman », par Lazlo Bane, est vraiment très
réussie.
La série raconte les aventures de
trois internes de l'hôpital du Sacré-Cœur, et notamment celle de John Dorian
(Zach Braff) alias « JD ». JD est un grand enfant qui possède la particularité
de se perdre fréquemment dans ses pensées, retransmises par sa voix intérieure,
et de s'imaginer des scènes surréalistes inspirées des situations qu’il est en
train de vivre. Ces « visions » sont alors représentées à l'écran,
parfois en plein milieu d'une discussion avec les autres personnages, un peu
comme dans la série « Dream On »
dans laquelle les pensées du héros sont illustrées métaphoriquement par des
extraits de films en noir et blanc. Son supérieur, le Dr Cox n’a rien à envier
au Dr House sur le plan du caractère. Son ami d’enfance et colocataire Turk,
est interne en chirurgie. JD est sous le charme d’Elliot, une camarade d’étude
un peu perturbée. Les autres personnages principaux son le concierge,
l’infirmière Carla, Todd (un interne en chirurgie obsédé sexuel) et Bob Kelso,
le chef de service. Chaque épisode est structuré autour de plusieurs histoires
thématiquement reliées par la voix off de JD qui fait office de narrateur.
Cependant, les épisodes possèdent toujours quelques passages plus sérieux sur
des sujets comme la maladie ou la mort. À la fin de la plupart des épisodes, JD
résume la morale ou le thème de l'épisode qui s'est déroulé et la façon dont
cela a affecté chacun des personnages.
« Scrubs » peut avoir plusieurs signification en argot anglais,
ici le terme fait référence à la fois aux blouses portées par le personnel
médical et à un groupe de personne de second choix incompétentes, ce qui semble
être souvent le cas des médecins de cet hôpital.
Il s’agit avant tout d’une série
médicale comique, à l’humour très potache, faisant de l'hôpital une zone de jeu
délirante pour les internes. Les français s'y sont aussi essayés avec un peu
moins de réussite avec la série « H »
avec Eric, Ramzy et Jamel Debbouze.
NIH, alertes médicales
Créée en 2004, cette série n’a vécue
qu’une saison de 20 épisodes.
Le NIH (Institut National de la Santé) s’inspire beaucoup
sur le principe, du Center for Disease Control (CDC) d’Atlanta. Cette nouvelle
agence est chargée d'intervenir, chaque fois qu'une menace médicale se présente
: terrorisme, empoisonnement meurtrier ou accidentel, ou simple épidémie. Elle
doit identifier la menace, son origine potentielle et l'isoler pour pouvoir
éventuellement l'éradiquer. Un travail qui demande des compétences différentes
et de la diplomatie. L’équipe est composée du docteur Connor (qui en est le
responsable), des docteurs Durant et Mc Cabe, de l’attachée de presse Eva Rossi
ainsi que de l’inspecteur Franck Powell. L’équipe tente ainsi d’élucider les
cas médicaux inexpliqués, épidémies et autres maladies infectieuses. Il s’agit
à chaque fois de problèmes de santé publique et l’équipe intervient sur le
terrain lorsque des morts suspectes sont signalées. Ils recherchent alors la
cause des décès et mettent en oeuvre les moyens nécessaires pour empêcher toute
contagion de se propager.
Mais, malgré des débuts tout à fait
honorables, l'audience de la série s'est effondrée en cours de saison, du fait
de la concurrence acharnée des autres chaînes américaines, et NBC a finalement
décidé de l'arrêter en fin de saison.
ReGenesis
« ReGenesis » est une série canadienne créée en 2004, qui s’est
arrêtée en 2008, après 4 saisons.
Le principe de cette série est très
proche de celui de NIH. La
Norbac est une organisation transnationale fondée pour
enquêter sur les avancées de la biotechnologie. Le Dr David Sandström, « l'un
des meilleurs biologistes moléculaires au monde » (dixit le scenario), y
dirige le laboratoire dont le siège est localisé à Toronto au Canada. Il est
entouré de son équipe : Carlos Serrano, Mayko Tran, Bob Melnikov, Hira Kahn et
Jill Langston. Ils ont tous leur propre spécialité et ils excellent tous dans
leur domaine. La Norbac
est dirigée d’un point de vue administratif et politique par Caroline Morrison,
ex-agent de la CIA,
qui est extérieure au monde de la science et qui est souvent en conflit avec Sandström.
Ensemble, ils sont chargés de résoudre les diverses crises biologiques qui se
déclanchent en Amérique du Nord, virus, mutations génétiques, attaques
bio-terroristes ou même problèmes écologiques... Mais il n'est pas seulement
question de biologie puisque chaque protagoniste de la série a aussi une vie
privée (la fille de David, le chien de Bob ou l’ex-petit ami de Carlos…).
De la bactérie mangeuse de plastique
aux moustiques génétiquement modifiés, Sandström et son équipe se penchent sur
les progrès en matière de biotechnologie, avec en toile de fond des enjeux
financiers, politiques et écologiques impliquant des terroristes, des gouvernements
et des multinationales pharmaceutiques.
Dans la saison 1, l'équipe doit tout mettre
en œuvre pour retrouver les origines d’un virus qui sème la mort sur son
passage. Un virus qui semble être le fruit d’un croisement entre la grippe du
chameau et une souche d’Ebola. Une telle mutation est-elle naturelle ou le
fruit d’un acte de bio-terrorisme ?
Bones
« Bones »
est une série télévisée américaine
créée en 2005 et diffusée
depuis 2007 sur M6. Le succès de cette série est en
grande partie du au duo d’acteurs
: David Boreanaz et Emily Deschanel.
Cette série est inspirée de la vie du
médecin légiste et écrivain Kathy Reichs (la créatrice de la série), dont on
peut lire plusieurs romans en Pocket Thriller avec le personnage de Temperance
Brennan. Le docteur Temperance Brennan est un anthropologue qui travaille au
Jeffersonian Institute et qui écrit de temps en temps des romans à succès. Elle
est très forte dans son domaine et arrive à trouver des indices sur n’importe
quel fragment de squelette. C'est pour cela que le FBI lui demande de
participer à certaines enquêtes lorsque seuls des ossements sont découverts.
Brennan est entourée de ses
collègues, tout aussi doués qu'elle : Angela Montenegro qui a créé un logiciel
permettant de refaire en trois dimensions le visage et le corps des victimes à
partir de quelques os du squelette, Zack Addy un jeune génie et Jack Hodgins un
spécialiste des insectes et des minéraux, obsédé par les théories du complot.
Dans ses enquêtes policières, Brennan
fait équipe avec l'agent spécial Seeley Booth, un ancien tireur d'élite de
l'armée qui fait plus confiance à son instinct qu'aux scientifiques.
Au fur et à mesure des épisodes,
Brennan sort de plus en plus de son laboratoire pour intervenir directement sur
le terrain, et elle à tendance à essayer de diriger les enquêtes. Lorsque c’est
nécessaire, elle n’hésite pas à se battre voire à utiliser des armes à feu.
Diagnostic meurtre
Créée en 1993 et arrêtée en 2001, cette
série, qui compte près de 180 épisodes, a vu passer un nombre impressionnant de
stars invitées par Dick Van Dyke, lui-même figure incontournable de la
télévision américaine depuis plus de 50 ans. Dick Van Dyke a participé à de
nombreuses comédies musicales (il a joué en 1965 dans « Mary Poppins ») et animé de
nombreux shows télévisés. Il est très populaire aux Etats-Unis. D’ailleurs, on
retrouve dans « Diagnostic meurtre »
pratiquement tous les membres de la famille Van Dyke, le père et le fils à la
ville comme à l'écran, et dans des rôles secondaires : petits enfants,
neveux et nièces, cousins et cousines...
Mark Sloan est chef de service au
Commmunity General Hospital de Los Angeles. Comme si ses activités de médecin
ne l'occupaient pas assez, il trouve encore le temps d'aider la police à
résoudre des enquêtes difficiles en tant que consultant. Steve Sloan, le fils
de Mark, est policier et il demande un
coup de main à son père chaque fois qu’il se trouve en difficultés.
A l’hôpital, Mark Sloan est assisté
par Amanda Livingstone, puis Bentley, qui est médecin légiste, et sur qui il
peut compter pour résoudre les enquêtes. Pendant les deux premières saisons,
Jack Stewart assiste Mark, Steve et Amanda puis décide de partir exercer dans
le Colorado. À partir de la troisième saison, Jesse Travis prend la relève. Ensembles,
ils résolvent quelques uns des crimes les plus étranges commis à Los Angeles.
La série explore donc à la fois le
monde hospitalier (même si les scènes médicales sont souvent assez simplistes)
et le système policier américain, sur un mode le plus souvent comique. Comme on
est aux Etats-Unis, Jesse Travis qui est médecin et Steve Sloan qui est
policier, s’occupent aussi d’un restaurant, le BBQ Bob’s.
Autres
Lancée la même année que la série de
Michael Crichton, « Chicago Hope »,
la soeur ennemie d' « Urgences »,
raconte le quotidien des médecins dans
un hôpital de Chicago. Même thème, même ville, les deux séries ont été en
concurrence aux Etats-Unis, leur première année de diffusion. Mais une des deux
séries était meilleure, et la production de « Chicago Hope », malgré ses qualités, a été arrêtée en 2000.
Enfin, il faut noter qu’une quinzième
et en principe dernière saison d’ « Urgences » est prévue.
Conseil numéro 22 [retour haut de page]
Pour
changer un peu, nous allons aborder cette fois-ci le thème des « séries médicales ». Il ne sera
donc pas question de livres, mais de télévision. Comme les policiers, les
avocats, les pompiers ou les cow-boys, le monde médical a ses séries télé qui
sont très populaires et très rentables. La plus connue est probablement
« Urgences » et la plus provocante « Nip/Tuck ». Certaines
sont très médicales, d’autres sont plus centrées sur les relations amoureuses à
l’hôpital, certaines sont trash et enfin d’autres sont très potaches. Pour
autant, les séries médicales ne sont pas un phénomène nouveau. Cela a commencé
aux Etats-Unis, dès 1963, avec « General Hospital », qui comportait
déjà tous les ingrédients nécessaires : des histoires d'amour complexes et des
patients sauvés in extremis. Cette série interminable a connu un succès
immédiat et elle est encore à l'écran de nos jours. Toutes ces séries sont
disponibles en DVD. Quant à savoir si elles ont vraiment un impact sur les
connaissances médicales des spectateurs... En tout cas, certains épisodes d’ « Urgences »
servent de base de formation aux étudiants en médecine aux Etats-Unis. Compte
tenu du nombre important de séries sur ce thème, cette chronique sera présentée
en deux parties.
Urgences
« Urgences » (ER pour « Emergency Room »
en anglais) est
une série télévisée américaine,
créée par Michael Crichton (l’auteur de
« Jurassic
Park ») en 1994 et diffusée en France depuis 1996. Il
s’agissait à
l’origine d’un roman (« Extrême
urgence », Pocket Thriller, 5,90 euros)
qui devait être adapté en film. C’est LA
série médicale de référence. Cela fait
maintenant 14 ans (et 14 saisons) que l'ont suit avec toujours autant
de
plaisir les aventures des urgentistes de l’hôpital du Cook
County à Chicago, et
ce, même si tous les acteurs de la première saison ont
depuis quitté la série,
en particulier les poids lourds comme George Clooney ou Anthony
Edwards. Il est
vrai qu'arrivé à la 14ème saison, les
scénarios commencent un peu à
s'essouffler.
Qui n’a pas entendu parler des Docteurs
Douglas Ross, Mark Greene, John Carter, Peter Benton, Kerry Weaver ou Susan
Lewis ?
D’un point de vue médical, la série
est très travaillée, et les cas présentés lors des premières saisons étaient
très didactiques. Au fil du temps, les pathologies et les gestes pratiqués aux
urgences sont devenus de plus en plus spectaculaires, et certaines saisons ne
sont pratiquement plus qu’axées sur la vie sentimentales des médecins et des
infirmières. Pour certains personnages, comme John Carter, on a pu suivre son
parcours médical aux urgences depuis ses fonctions d’externe, puis d’interne et
enfin de senior.
Beaucoup de thèmes d'actualité,
parfois graves, sont traités à travers les patients et/ou les médecins de
l'hôpital (la séropositivité, l'homosexualité et l'homoparentalité, l’alcoolisme,
la toxicomanie, la situation au Darfour, le cancer, le suicide, l'euthanasie,
la guerre en Irak, les erreurs médicales…). Cependant, un ton humoristique est
assez souvent adopté, notamment via certains personnages (par exemple le réceptionniste
Jerry Markovic, le docteur Dave Malucci ou encore le docteur Archie Morris qui
semble très souvent totalement incompétent) ce qui permet au spectateur de
respirer lors de certains épisodes particulièrement éprouvants.
Grey’s anatomy
Cette série créée en 2005, nous
raconte la vie tourmentée de la jeune Meredith Grey, fille d'une célèbre
chirurgienne (qui a écrit un traité d’anatomie très connu) qui tente de réussir
son internat. L'intrigue est centrée sur la vie des médecins, et leurs histoires
de cœur, plus que sur les patients. Mais
la série demeure très réaliste quand elle se penche sur des actes chirurgicaux.
Le docteur Meredith Grey a donc pour lourd fardeau de devoir porter le nom de
sa mère et fait ses premiers pas en tant qu'interne en chirurgie dans le
Seattle Grace Hospital où sa mère a exercé pendant de longues années. Très
vite, on apprend que sa mère est atteinte de la maladie d’Alzheimer et on voit
les difficultés de l’accompagnement d’une personne malade. Meredith va devoir
travailler sept années pour réussir sa spécialité. Tout comme ses camarades
internes de première année, Cristina Yang, Izzie Stevens, George O’Malley et
Alex Karev, elle était encore une étudiante il y a très peu de temps.
Aujourd’hui, ils sont confrontés à des choix qui peuvent mener les patients à
la vie comme à la mort, au meilleur comme au pire.
Les internes sont aidés dans leur
tâche par leur supérieure hiérarchique directe, la résidente Miranda Bailey,
surnommée « la nazie » (« le tyran » dans la version française) mais aussi les
chirurgiens titulaires, généralement chefs de service : le chef de service de
chirurgie, le Docteur Richard Webber, le chef de cardiologie, le Docteur
Preston Burke, le chef de neurochirurgie, le Docteur Derek Shepherd (alias docteur
« Mamour ») et son ex-femme qui est la chef de gynécologie, le Docteurr
Addison Montgomery.
Le titre de la série est un jeu de
mots à partir du titre d'un traité d'anatomie populaire chez les étudiants en
médecine américains, intitulé "Gray's Anatomy" paru pour la première
fois en 1858 et qui en est à plus de 39 éditions. Ce livre existe aussi en
français chez Elsevier Masson : « Gray’s anatomie pour les étudiants »
(70,30 euros).
A noter qu’il existe une série
dérivée (spin off) : « Private
practice ». Après avoir échoué à se réconcilier avec les deux hommes
de sa vie, le Dr Addison Montgomery quitte l'hôpital du Seattle Grace pour Los
Angeles. Elle y retrouve des amis d'université et accepte un poste dans leur
clinique spécialisée dans la fertilité. Peu à peu, sa vision idéaliste se
dégrade, en constatant que même des conseillers conjugaux ne parviennent pas à
faire fonctionner leur propre mariage.
Nip/tuck
C’est une série télévisée américaine diffusée
depuis 2003 sur le réseau FX Network. En France, la série est diffusée depuis
2004 sur Paris Première. "Nip/Tuck" est une expression
argotique anglaise qui fait signifie "Inciser/Retendre", ce qui
représente les bases du lifting!
La série se déroule donc dans
l'univers de la chirurgie esthétique, un monde qui n'avait jusqu'à présent
jamais inspiré de série télé. D’abord à Miami, puis à Los Angeles depuis la
cinquième saison. A travers la vie de deux chirurgiens plasticiens (Sean
McNamara et Christian Troy) et de leurs patients, Nip/Tuck dépeint une société
à la dérive, où seuls comptent l'argent et les apparences. La série trash et
parfois violente a souvent été récompensée pour ses effets spéciaux. Il est
vrai que l'esthétique de la série est une complète réussite. Les opérations
sont très réalistes, même si au fur et à mesure des saisons les cas traités et
les opérations reflètent de moins en moins la réalité. Le scénario est
extrêmement provocant, et de nombreux épisodes sont interdits aux moins de 16
ans.
Au-delà de sa provocation affichée,
Nip/Tuck d'écrit la lente dégradation d'une famille et le questionnement de
deux hommes de quarante ans à qui, en apparence, tout a réussi et qui
s'interrogent sur leur vie. L'un comme l'autre se trouvent confrontés à leurs
échecs.
Dr House
« Dr House » est une série
créée en 2004 par David Shore et produite par Bryan Singer (X-men), elle a été
diffusée pour la première fois sur la Fox. En 2006, c’est sur TF6 que la série a été
diffusée, puis en 2007 sur TF1. Aux Etats-Unis, elle rassemble près de 25
millions de téléspectateurs par épisode. La série et l’acteur (Hugh Laurie) ont
été récompensés plusieurs fois par : le SAG Awards, le Golden Glob Awards et
l’Emmy Awards.
Médecin sarcastique et controversé,
le Dr Gregory House est un diagnosticien brillant. Anti-héros par excellence,
il cultive à la fois un caractère antisocial et un charisme singulier. Ce
spécialiste de médecine interne est-il fondamentalement mauvais ou est-ce un
homme blessé par la vie ?
Dans cette série le criminel est la
maladie et le héros un médecin irrévérencieux controversé qui ne se fie à
personne et moins encore à ses patients (« Les patients mentent
toujours »). Le Docteur Gregory House est dépourvu de bonnes manières et
ne communique pas avec ses patients. Il a eu une grave pathologie qui l’oblige à
utiliser une canne et il est addicte au Vicodin un antalgique à base de codéine. Il
fait preuve de beaucoup d’obstination envers les cas qui lui sont confiés,
particulièrement si ses confrères ont échoué avant lui. Son comportement se
situe à la frontière d’une attitude antisociale. Il est secondé par une équipe
de jeunes experts : un neurologiste, un immunologiste, sans oublier son bon ami le Dr. James Wilson un
spécialiste en oncologie …
Contrairement à la série « Urgences »,
les épisodes de « Dr House » tournent autour d’un patient (une
pathologie). A l’instar des séries policières, la recherche du bon traitement
est l’objet principal de la série. Des intrigues, des hypothèses ou même de la
chance se mêlent pour trouver le traitement pour le patient. Les cas
diagnostiqués sont souvent improbables et très discutables d’un point de vue
purement médical. Par ailleurs l’équipe médicale fait tout elle-même (prises de
sang, scanner, fibroscopies, EMG, visites au domicile des patients,
chirurgie….) ce qui paraît peu réalise. Les méthodes diagnostiques sont souvent
empiriques, avec une hypothèse = un traitement. Le malade va avoir d’emblée une
chimiothérapie ou une plasmaphérèse alors qu’une simple sérologie aurait
conduit au diagnostic final.
Autres
Les
séries médicales sont maintenant
très nombreuses, sans compter les produits dérivés
à la française :
« L’hôpital »,
« H », ou « Equipes médicales d'urgences » (anciennement « Faites
le 15 »). Dans la deuxième partie, nous verrons :
« Scrubs », « NIH », « ReGenesis »,
« Bones » et « Diagnostic Meurtre ».
Si « Urgences » est LA
série médicale par excellence, « General Hospital » est étonnante par
sa longévité. Pas moins de 45 ans que la série est diffusée aux Etats-Unis et
le succès ne s'est jamais démenti. Là où pour la plupart des séries médicales
c'est le réalisme qui prime, dans General Hospital, le monde médical n'est
qu'un prétexte, un simple cadre à voir évoluer les histoires de chacun.
Certains se demandent encore comment une idée de départ aussi simple "la
vie et les amours de plusieurs familles autour de l'hôpital de Port
Charles" a pu engendrer autant de rebondissements.
Conseil numéro 21 [retour haut de page]
Nous allons
cette fois-ci aborder à nouveau le thème de la « Maladie d’Alzheimer (2) ». Depuis quelques temps, cette
pathologie est devenue à la mode : année Alzheimer (2007), Plan Alzheimer
2008-2012, émissions de télévision, films de cinéma, photos, spectacles et bien
sûr les livres : romans, BD et témoignages. Il y a même maintenant une
radio consacrée uniquement à cette maladie : http://www.radioa.info. Nous présenterons
cette fois-ci un roman très original sur ce sujet qui a reçu 2 prix (le prix
Wepler Fondation La Poste
2007 et le prix Pierre Simon Ethique et Réflexion 2007), et une bande dessinée
très émouvante.
Olivia Rosenthal
On n’est pas là pour disparaître
Editions Verticales, 16,50 euros
L’écriture
de cet ouvrage est assez déroutante, et peut gêner le lecteur. C’est une
écriture moderne, provocatrice par les ruptures de style, où on n’identifie pas
toujours le personnage qui est concerné (tantôt c’est « i l », « je »,
« tu »…), par certains cotés cette écriture rappelle assez le
« nouveau roman ». Les phrases sont courtes, fragmentées, c’est un
véritable exercice littéraire, un objet littéraire. Le texte est composé de fragments, d’hypothèses,
de réflexions, de poèmes, de listes, de données scientifiques, d’éléments
biographiques sur Aloïs Alzheimer ou sur l’auteur. Comme le dit le personnage
principal. : «Je suis constitué de
fragments très distincts et séparés les uns des autres par de grands vides».
Dans ce septième
roman Olivia Rosenthal a choisi d’aborder la maladie d’Alzheimer à travers un
fait divers assez particulier et rarissime : le 6 juillet 2004, monsieur
T. a poignardé sa femme de cinq coups de couteau. Il ne le sait pas. Depuis, il
l’attend. L’auteur parle de « la maladie d’A. » sans jamais la
nommée, comme par superstition, comme si c’était contagieux, comme si le fait
de la nommer lui faisait courir le risque d’y succomber, elle ou ses proches.
Très souvent, elle parle d’elle-même, de ses proches, de ses craintes, sans que
ça ait forcément de rapport évident avec le roman. « Ce livre a
pour but de m’accoutumer à l’idée que je pourrais être un jour ou l’autre
atteinte par la maladie de A. ou que, plus terrible encore, la personne avec
qui je vis pourrait en être atteinte. »
La volonté d’un certain non-sens, de
passer du coq à l’âne, d’un sentiment de confusion dans le texte est
volontaire, organisée, provoquée pour essayer de donner au lecteur la sensation
de ce que peut ressentir un patient atteint de cette maladie. Mais bien
sûr : « Les malades ne peuvent pas
parler de leur maladie parce qu’ils n’ont pas de mots, et les biens portants
parce qu’ils les ont ».
Tout au long du livre, l’auteur
propose au lecteur des exercices mentaux faisant ou non appel à son imagination
: «Faites un exercice. Calculez
mentalement le nombre de personnes dont vous avez pris l’habitude de parler au
passé. Pas les morts bien sûr, les vivants.»
L’objectif du texte étant avant tout
de déstabiliser le lecteur, on peut dire qu’il est largement atteint.
Extrait :
« La maison a changé, elle a fait supprimer le gaz, installer des
robinets à fermeture automatique, un portillon pour protéger l’accès de
l’escalier, elle a fait modifier la température du chauffe-eau, poser des mains
courantes dans le couloir, des interrupteurs visibles et fluorescents, elle a
fixé sur chaque porte le nom de la pièce avec un dessin correspondant, a marqué
au sol et en couleurs certains trajets indispensables et quotidiens, a fait
remplacer toutes les fenêtres anciennes par des fenêtres aux vitres
feuilletées, a rangé les médicaments, les produits ménagers ou inflammables
dans des boîtes hermétiques, a condamné la porte du garage ainsi que celle du
grenier, a fait poser une moquette épaisse sur les escaliers, aménager un
système d’ouverture de la porte d’entrée avec code à quatre chiffres, poser des
serrures sur les tiroirs contenant des objets contondants, elle a supprimé les
miroirs dans la chambre, a fixé le long de la baignoire une barre d’appui en
inox, elle a fait le maximum, elle ne sait pas si ce sera assez, elle a fait
tout ce qu’elle pouvait, elle est fatiguée, elle va se reposer un peu
maintenant, elle va attendre. »
Paco Roca
Rides
Delcourt - Mirages, 14,95 euros
Après sa dernière crise d'Alzheimer,
Ernest est placé par sa famille dans une maison de retraite contre son gré. Son
fils ne sait plus comment gérer ses pertes de mémoire. Dès lors, il y affronte seul
sa nouvelle vie, apprend à connaître les autres patients et le fonctionnement
du centre. Il découvre la dure réalité d'un quotidien très monotone rythmé par
les prises de médicaments, les siestes et les repas. Et surtout le dernier
étage - la grande peur de tous - où sont
transférés ceux qui ne peuvent plus se suffire à eux-mêmes. On assiste petit à
petit à l’évolution de la maladie d’Ernest qui voit son quotidien lui échapper.
La vie en collectivité est bien rendue, avec les résidents qui empiètent sur
l’intimité les uns des autres ; les dérapages, les tentatives de tricherie
et les blagues de collégiens nous montrent que ces malades restent encore des
humains. Certains ne vivent plus que pour attendre l’heure du repas, l’heure du
bingo, la visite hebdomadaire, voir mensuelle ou même annuelle des enfants et
petits-enfants. Certains vivent dans leurs rêves, et voyagent depuis des années
dans les splendeurs oubliées de l’Orient-Express. Certains enfin ne vivent que
pour leur amour, qui ne les reconnaît même plus, mais qu’importe. Ernest fera
connaissance de ses camarades comme Emile, son compagnon de chambrée, Madame
Rose qui passe ses journées à regarder par la fenêtre et se croit en voyage,
Madame Simone qui cherche un téléphone, Alphonse, ancien animateur de radio qui
ne fait plus que répéter ce qu'il a entendu, Adrienne, Eugène qui se débrouille
toujours pour tripoter les jeunes femmes, René, un ex-champion, Léon, un
aveugle, ainsi que Georgette et Marcel. Emile, qui n’a pas de problèmes de
mémoire et qui au départ profite d’Ernest et des autres résidents ayant la
maladie d’Alzheimer, finit par évoluer et par devenir sympathique au lecteur.
Il fallait beaucoup d’audace pour évoquer
la maladie d’Alzheimer en BD. Paco Roca s’en tire très bien, car il montre à la
fois la réalité et les conséquences de cette terrible maladie tout en gardant
beaucoup de tendresse pour ses personnages. La simplicité du dessin, les décors
épurés et les couleurs donnent au récit une douceur et une légèreté que le
sujet n'a pas. Ce choix a pour effet de rendre l'ensemble très agréable
permettant ainsi de dédramatiser la situation. L’histoire reste pleine d’humour
(en particulier la folle virée en voiture), avec même souvent un aspect
poétique des personnages avec toutes leurs petites manies. Ce qui reste en
mémoire au lecteur, ce sont les élans de vie de ces résidents.
L’auteur signale, dans les dernières
pages de l’album, qu’il s’est servi des témoignages de son entourage et de sa
propre expérience pour mettre en forme ce récit. C'est cela qui donne cette
force et cette authenticité à ce récit, car les anecdotes sont toutes très
justes. A noter simplement une petite erreur médicale, en ce qui concerne la
thérapeutique, car par deux fois, il est noté une association tacrine et
donépézil, ce qui, hormis le fait que la tacrine n’est plus utilisée depuis
plus de 10 ans, revient à donner deux fois un anticholinestérasique.
La couverture de ce livre est
magnifique et semble décalée par rapport au titre, mais on la comprend au fil
de la lecture.
Extraits :
« -Tenez, vous voyez ceux-là ? D’après vous, quel lien les
unit ?
-Eh bien, c’est assez clair… Ceux qui sont dans les bras l’un de l’autre
sont mari et femme, et celui qui les regarde doit être un proche venu leur
rendre visite.
-Ha, ha… La vieillesse est une mauvaise farceuse. En fait, celui qui
regarde est le mari de la petite vieille. Il vient la voir tous les jours tiré
à quatre épingles et bien parfumé… Quant à elle, elle ne le reconnaît plus.
Elle ne lui donne jamais de baiser ni la moindre marque d’affection. Rien qui
laisse transparaître le plus petit souvenir d’une vie passée ensemble… Pour
elle, son mari, c’est l’autre, le vieux qu’elle a connu ici. Parfois, ils se
tripotent comme des adolescents… Sous l’œil résigné du mari… C’est curieux
comme on perd la tête mais pas les pulsions sexuelles… »
En complément,
on peut citer 2 ouvrages rédigés par des bénévoles de l’association
« Vieillir Ensemble » (Hôpital Paul Brousse, Villejuif) et qui
interviennent auprès de patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Ils ont
tous les deux étaient publiés chez L’Harmattan. Le premier s’intitule « Rencontres avec les malades Alzheimer »
et a été écrit par Françoise Gourgues et Marie-Hélène Wagner (13,50 euros).
C’est à la fois un recueil de témoignages et un guide pratique pour quiconque
voudrait devenir bénévole d’accompagnement auprès de personnes âgées atteintes
de la maladie d’Alzheimer. Le deuxième ouvrage a été écrit par Anne
Pinoche-Legouy et a pour titre « Le
Souci de la dignité » et comme sous-titre « L’appel silencieux des aînés dépendants »
(11 euros). Il
aborde l’aspect du bénévolat sous un aspect
philosophique, avec d’une part le
fait que dans nos sociétés modernes on ne prête pas
attention aux malades âgés
et d’autre part le manque d’engagement solidaire des jeunes
générations. Il est
aussi évoqué le « modèle
canadien » où les étudiants en santé
doivent
obligatoirement valider un minimum de 45 heures de
bénévolat au sein
d’institutions hospitalières ou d’associations
humanitaires au cours de leur
cursus universitaire.
Conseil numéro 20 [retour haut de page]
Nous allons
aborder cette fois-ci le thème de la « révolte des vieux » à travers deux ouvrages très atypiques.
L’un a plutôt une vision post soixante-huitarde des choses et l’autre une
vision carrément anarchiste et assez violente. Les deux sont publiés chez des
petits éditeurs pas forcément faciles d’accès.
Michel Varagne
La révolte des vieux
Edition AàZ Patrimoine, 19 euros
Michel
Varagne, l'auteur de cet ouvrage de politique fiction est âgé de 54 ans. Devenu
journaliste à la République
du Centre, il imagine l'implication d'un journaliste retraité, qui sait intriguer
les médias, pour lancer une révolte pacifique mais très efficace.
S'appuyant sur les nouvelles technologies
(Internet), cinq retraités vont donc lancer un mouvement de révolte, relayé par
les médias, s'appuyant sur la force de frappe consommatrice que représentent en
2019 les 18 millions de plus de 60 ans. Il s’agit bien sûr des fameux papy-boomers
qui ont vécu mai 68. Beaucoup sont pauvres, ont à peine de quoi se chauffer, se
sentent exclus par les générations qui les suivent... Aux quatre coins de la France, ils complotent, car
l'action est pour bientôt. Le mouvement du 17 janvier marchera-t-il ? Et
qu'entend-il démontrer ? En tout cas le mouvement est lancé et il ne devrait
plus s'arrêter ... Et ce qui était presque, à l'origine, une farce de
"vieux potache", est devenu une manifestation politique que les
politiciens aimeraient assez récupérer.
Leur
motivation ? Eviter de se retrouver face à leur "vie ratée de n'avoir pas transmis à leur descendance un monde meilleur
que celui dont ils ont hérité". Ils veulent de la considération, des
lieux pour les malades, des moyens pour les plus pauvres….
Ils ont
décidé qu'ils en avaient marre qu'on les ignore, qu'on les méprise, qu'on les
restreigne. Ils vont donc semer le désordre en utilisant avec excès les moyens
de la vie quotidienne. Ce n'est pas parce qu'on a plus de 60 ans que l'on
ignore les conséquences d'un branchement électrique programmé à une heure
précise durant un hiver glacial.
Un scénario
qui pourrait bien se réaliser dans les années à venir.
Ce livre se
lit facilement, même si le style littéraire reste pauvre. L’auteur écrit comme
un journaliste et à tendance à faire des exposés successifs :
vieillissement de la population, modifications climatiques, consommation
d’électricité par grand froid, maisons de retraite… Chaque fois ces passages
sont très riches et très détaillés, mais alourdissent le récit. Ceci donne
malheureusement à l’ensemble de l’ouvrage un aspect « exercice de
style » très artificiel. Toutefois, les moyens de pression proposés sont
très réalistes, et il est fort probable qu’ils soient utilisés un jour. Pour
ceux qui voudraient aller plus loin, Michel Varagne a ouvert un blog sur ce
thème : http://www.larevoltedesvieux.com/
Extrait :
« Eh
oui, Jean-Pierre n’a pas tort. Tout
augmente, et vite. Le nombre de personnes âgées de plus de
soixante ans a plus
que doublé, depuis les années 1950. Les centenaires sont
si nombreux qu’on ne
les voit même plus souffler leurs bougies en famille dans les
journaux
régionaux où l’on a désormais placé
la barre de qualification à cent dix ans
pour les femmes, et cent cinq pour les hommes ! Incroyable. Le
centenaire
est, pour ainsi dire, dévalué. Et, comme on dit,
l’intendance n’a pas vraiment
suivi, notamment pour les personnes les plus âgées, les
plus handicapées et les
plus démunies. Les réformes ne sont évidemment
presque jamais allées jusqu’au
bout, les hommes et les femmes politiques ayant le plus souvent
manqué de
détermination, et préféré les
réélections plus ou moins faciles et immédiates
à
la courageuse gestion du long terme. Quant aux maisons de retraite, et
surtout
aux établissements médicalisés, ils font de plus
en plus cruellement défaut sur
l’ensemble du territoire, mis à part dans les
départements les plus riches. La
décentralisation a, si l’on peut dire, donné
naissance à une vieillesse à deux
vitesses. Mais les coûts de ces maisons de retraite sont
très élevés, et nombre
de personnes âgées n’ont pas les moyens
d’aller y passer la fin de leurs jours.
Jean-Pierre ne fait pas parti des plus démunis. Ni, mais cela
viendra sans
doute plus vite qu’il ne le croit, des plus âgés et
des plus handicapés. Pour
l’instant, c’est un « jeune vieux »,
comme on dit, qui a toujours
correctement gagné sa vie et dispose donc d’une bonne
pension. Pour ne rien
gâter, il est plutôt en forme. Mais cela ne
l’empêche pas de se préoccuper des
autres. De se faire du souci pour tous ceux, et il y a pléthore,
qui sont dans
la peine, dans la misère, ou qui connaissent la solitude et
l’ennui. »
Rolland Hénault
On les aura !
Les éditions Libertaires, 10 euros
On les
aura… sous entendu, comme en 14. Le sous-titre de ce cours roman est d’ailleurs
: « Récit saignant d’une révolte
armée dans une maison de retraite ». Le programme est clair !
Une maison
de retraite ordinaire, comme il en existe des milliers, avec ses vieux
infantilisés et le regard condescendant des familles et des soignants. Cet état
de fait étant l’aboutissement de l’implacable logique actuelle d’exclusion
sociale des vieux. Pourtant, dans cette maison de retraite, la révolution est
en marche. Mais ici, on est loin de mai 68 et on est plus proche de Rivarol. Le
discours est plus libertaire que social.
Trois
petits
vieux vont être à l’origine
d’évènements bouleversant l’équilibre
de la nation
! Trois vieux, Ferdinand, Sidi et le narrateur, observent la vie du
Camp, comme
ils qualifient la maison de retraites, avec ironie et dédain.
Les quelques
visites espacées dans l’année des proches leur
révèlent toute l’hypocrisie dont
les hommes peuvent être capables. Heureusement que les sorties
autorisées mais
sous surveillance vers le café « Chez Mimile »
rompent avec le quotidien et
permettent quelques rencontres et discussions inhabituelles. Les
infirmières
surnomment le trio « Les conspirateurs » et ne savent pas
encore à quel point
elles ont touché juste ! Les trois compères vont se muter
en terroristes,
amateurs mais efficaces, pour faire sauter leur maison de retraite. Ils
sont
bien décidés à mourir en beauté,
c’est-à-dire debout. Dénoncés, ils sont
arrêtés et condamnés à
perpétuité ! Ce qui est paradoxal pour ces vieux
qui se considéraient déjà comme des prisonniers
dans le couloir de la mort. Après
jugement, ils rejoindront un second Camp où ils ne seront pas
plus malheureux. En
effet, ils se sentent finalement mieux en prison qu’à la
maison de
retraite ! Pourtant leur geste en entraînera
d’autres... La révolte
s’étend dans tout le pays et tous les vieux se lancent
dans la lutte armée. Ils
sont rejoints par d’autres exclus… C’est
l’anarchie la plus complète dans le
pays, l’objectif est atteint.
Extrait :
« Enfin, bientôt du nouveau. C’est ce qui manque, à vrai dire, dans les
maisons de retraite. Il n’y a que du vieux.
Le nouveau, c’est quand il y a un vieux qui calanche. On voit arriver le
fourgon, repeint en marron clair, avec des petites ailes bleues. C’est
charmant. Ca fait du bien au moral. Ca prouve qu’on va monter au ciel, même si
c’est un peu haut.
Justement, il est là le fourgon. Il vient de stationner.
Depuis le temps qu’on l’attendait !...
On remplace le vieux mort par un vieux tout neuf, encore vivant, et, du
coup, c’est effectivement nouveau.
On l’observe avec curiosité, le nouvel arrivant. Avec son air ahuri, il
tient encore un peu de l’être humain. C’est attendrissant. Pour un peu j’en
pleurerais. D’ailleurs j’en pleure.
Il n’est pas vraiment comme nous. Il lui faudra bien huit jours pour
s’adapter. Abandonner les soins corporels élémentaires, négliger la toilette,
attraper le coup de peigne maison, le poil hérissé, puer des pieds, oublier sa
braguette… se pisser dessus, un peu.
Et préparer la Fête,
avec les Guirlandes. Avec l’Accordéon, le Mousseux, le Petit Vin Blanc… les
Travailleurs Sociaux qui dansent tout autour, la danse du scalp… le scalp des
chauves. Le scalp de la chimio, le scalp de Parkinson. C’est plus varié qu’on
s’imagine. Il y a même des tas de possibilités, pour souffrir et pour crever
dans la bonne humeur, au Camp.
- Allez les papys les mamies, c’est l’heure de la Fête… aujourd’hui on oublie
tout, les cols du fémur, les cancers du foie, les tumeurs de l’utérus, les
prostates qui font le gros dos, avec les sondes… allez, debout les papys les
mamies! c’est la fête, nom de dieu ! »
En janvier 2007, « Aufstand der Alten » (« La révolte des vieux »),
un
téléfilm d’anticipation, a été
diffusé à une heure de grande écoute sur la
chaîne publique allemande ZDF, et a choqué
l’Allemagne en relançant le débat
sur le vieillissement de la population et l’appauvrissement des
seniors. Ce
docu-fiction met en scène une jeune journaliste de 2030 qui
prend peu à peu
conscience de l’appauvrissement généralisé
des personnes âgées et du développement
de la criminalité «grise». Les vieux braquent des
banques afin de pouvoir payer
leurs médicaments. Dans cette Allemagne particulièrement
touchée par le
vieillissement de la population, le gouvernement a mis en place une
retraite
unique s’élevant à 560 euros par mois, les conflits
entre les générations
atteignent leur paroxysme, des médecins euthanasient des
aînés qui n’ont rien
demandé, les proches maltraitent leurs parents âgés
et des maisons de retraite (des
camps) sont construites en Afrique pour y parquer les vieux dont plus
personne
ne veut… Appauvrissement des personnes âgées,
retraites désastreuses,
euthanasie économique, maltraitance : on voit bien qu’il
s’agit vraiment de
science fiction et qu’un tel scénario est impossible en
France… Pourtant, le
nombre de délinquants seniors augmente en Allemagne et il a
explosé au cours
des 10 dernières années au Japon.
Conseil
numéro 19 [retour haut de page]
Nous allons
aborder cette fois-ci le thème de la « réanimation » à travers un roman anglais et un roman
américain. Les deux ont une vision assez sombre de l’hôpital ce qui se traduit
par un humour noir très ravageur. Dans ces services où l’on côtoie la mort au
quotidien, la vie semble aussi s’épanouir, notamment à travers la sexualité des
soignants qui joue un rôle important dans ces deux ouvrages. Dans les deux cas,
il s’agit d’un adulte (une fille pour l’un, et un fils pour l’autre) qui attend
la mort de son père hospitalisé dans un service de réanimation.
Alan Bennett
Soins intensifs
Denoël et d’ailleurs, 12 euros
Alan Bennett est né à Leeds dans le
Yorkshire, en mai 1934. C’est un touche-à-tout connu en Angleterre comme un
homme d’esprit, un comique (précurseur de l’esprit des Monty Python), un auteur
de pièces de théâtre, un scénariste de cinéma : il a écrit « Prick up your ears » pour Stephen
Frears ou « La folie du roi George ».
Il a écrit également un nombre considérable de films pour la télévision
anglaise. C’est un spécialiste des monologues décapants, qu’il a publiés sous
le titre collectif de « Talking
heads ». Monologue par exemple d’une ménagère n’osant pas s’avouer
qu’elle est troublée par son épicier pakistanais. Ses pièces sont régulièrement
jouées à Paris.
Soins intensifs est assez représentatif de la méthode de travail de Bennett. Ecrit tout
d’abord pour la BBC
en 1982, ce texte a été retravaillé pour aboutir à ce court roman très corrosif
sous ses allures anodines, sorti en février 2006.
Midgley est un professeur d’anglais
d’une quarantaine d’années, qui apprend que son père se trouve à l’hôpital dans
le coma, après une attaque. Il est presque soulagé de savoir que celui-ci va mourir,
persuadé qu'une nouvelle vie l'attend, loin du mépris et de l'emprise
paternels. Mais, même si Midgley a souvent rêvé de tuer son père (et, dans ses
rêves, tout allait très vite), il décide de l’assister dans ses derniers
instants, en fils modèle. Sa femme ne lui apporte aucun soutien. Et à l’hôpital
même, les infirmiers ou les médecins interviennent comme des fantômes qui ne
sauraient pas quoi faire. L’absurde est poussé à son comble par le fait que ce
père, tout en étant dans un état végétatif, se refuse à mourir. L’agonie est
interminable. Et alors que la libération se fait attendre, le lecteur suit avec
délices la mise en scène de l'hypocrisie sociale et des difficiles relations
père-fils.
Les saynètes hilarantes aux dialogues
grinçants se succèdent ; attisées par une vieille tante et son épouse, les
embrouilles familiales prennent le dessus. Même le personnel hospitalier s'en
mêle. Autour du lit, défilent une humanité peu reluisante : tante cancanière,
famille modèle en train de se craqueler… Heureusement, Midgley que personne ne
remarque finira par trouver un peu de réconfort dans les bras d’une infirmière
rondelette et souillon.
Extraits :
« -Mr Midgley, dit le médecin en le secouant par l’épaule.
-Denis, dit tante Kitty, c’est le docteur.
Il s’agissait d’un jeune Pakistanais un peu pâlichon et durant une
fraction de seconde, Midgley crut qu’il s’était assoupi dans sa classe et que
c’était un élève qui le réveillait.
-Mr Midgley ? répéta le médecin.
Il s’exprimait d’une voix grave et ferme. Il avait tout au plus vingt-six
ans.
-Votre père a eu une attaque cardiaque, dit-il en consultant son dossier.
De quelle gravité, c’est difficile à dire. Quand il est arrivé ici, il
souffrait d’hypothermie.
Tante Kitty émit un petit cri plaintif. Un tel fléau avait souvent fait
la une des journaux ces derniers temps.
-Il a dû perdre connaissance et rester étendu sur le sol pendant au moins
deux jours.
-Je vais généralement le voir le week-end, dit Midgley.
-La pneumonie s’est bien installée. Son cœur est très affaibli. Tout bien
considéré, conclut le médecin en consultant encore une fois son dossier, il est
probable qu’il ne passera pas la nuit.
En repartant, il glissa le dossier sous son bras et Midgley vit qu’il n’y
avait rien à l’intérieur. »
Richard Dooling
Soins à hauts risques
Archi poche, 7,50 euros
Le jeune interne Ernst Werner est un
médecin très particulier. Il est cynique, coureur de jupons, caractériel et peu
social avec les autres membres du personnel. Il crie sur les infirmières, se
fout un peu des patients, et dénigre les familles...
Mais voilà qu'un jour aux côtés du
patient du bloc 5 se tient une charmante jeune femme qui ne le laisse pas
indifférent. Le docteur n'aura plus qu'une obsession : mettre Félicia, la fille
de ce patient dans son lit. Surtout que la jeune femme, apprentie mannequin
n'est pas des plus prudes et semble avoir une certaine attirance pour lui.
Mais pourquoi veut elle à tout prix
faire cesser les soins donnés à son père? Pourquoi estime-t-elle que ce soit de
l'acharnement thérapeutique? Pourquoi fait-elle tout pour écarter sa demi sœur
Constance, son aînée, du chevet de son père?
Alors que Félicia veut qu’on arrête
toute réanimation, Constance, au contraire veut que l’on tente tout pour sauver
son père et ne comprend pas qu’on ne lui ait toujours pas posé de sonde
d’alimentation. Y a t il un rapport avec l’héritage de deux millions de
dollars ? La date du décès a-t-elle son importance ? Werner est-il un
complice ou une victime ?
L’auteur, ancien infirmier en soins
intensifs connaît bien cet univers qu’il décrit avec beaucoup de minutie et de
cynisme. A noter qu’une adaptation cinématographique de ce roman a été faite en
1997 par Sydney Lumet sous le titre anglais de Critical Care.
Extrait :
« Autrefois, Werner gaspillait un nombre incalculable d’heures par
semaine à être gentil et agréable avec les infirmières et le personnel de
l’hôpital. Très vite, il se rendit compte que, pendant qu’il était occupé à
être gentil et agréable, les patients étaient occupés à tomber comme des
mouches autour de lui. Plus grave encore, pendant qu’il était occupé à être
gentil et agréable, d’autres jeunes internes étaient occupés à décortiquer les
articles des revues médicales et les archives de l’hôpital. Etre gentil et
agréable avec les bien-portants avait empêché Werner de se distinguer dans
l’étude d’un cas particulièrement difficile de maladie du légionnaire – un
étudiant en troisième année de médecine lui ayant grillé la politesse. Une
autre fois, le fait d’avoir été gentil et agréable avec des bien-portants avait
eu un autre résultat contrariant, quand un interne en radiologie avait
diagnostiqué un syndrome de Goodpasture, alors que Werner avait précédemment
expliqué à d’éminents professeurs, au cours d’une de leurs visites, qu’il
s’agissait d’une hémosidérose pulmonaire idiopathique.
Juste après son internat, Werner avait compris qu’il fallait être solide
et prêt à tout dans un univers comme celui du Centre médical universitaire et
que, pour y parvenir, un interne devait préserver chaque petite provision de
temps et d’énergie pour l’étude et la lutte contre la maladie. Les tâches de
second ordre, comme être gentil et agréable, devaient être déléguées au
personnel de second ordre. Si un interne voulait s’assurer un avenir au Centre
médical, il devait judicieusement éviter d’engager la conversation avec qui que
ce soit, à commencer par la potiche que Werner avait sous la main et qui
pouvait se tenir en face d’un patient tout bleu, vous tendre ses résultats de
labo qui confirmaient, comme vous le supposiez, que chaque cellule de ce
patient était asphyxiée, et vous demander en toute innocence si vous vouliez
qu’elle appelle le service de pneumologie pour augmenter l’oxygène.
-Non, répondit Werner sans la regarder. N’augmentons pas l’oxygène.
Demandons plutôt au service d’entretien d’apporter un sac-poubelle.
-Un sac-poubelle ? murmura d’une voix rauque Marie Quelque-Chose,
dont le visage aux capillaires engorgés avait viré au vermillon flamboyant.
-Ouais, dit Werner, comme ça on pourra l’enrouler autour de la tête du Un
et voir combien de temps il faut à ces petits gribouillis rigolos pour
disparaître de son moniteur cardiaque ! »
Un peu en dehors de la réanimation
proprement dite, il y a l’univers des urgences et des gardes de nuit. Parmi
toutes les gardes, on peut individualiser le système de « la grande
garde », qui n’existe qu’en région parisienne et qui consiste à
centraliser chaque soir la garde de neurochirurgie sur un seul hôpital pour
toute l’assistance publique. « La
grande garde », c’est le titre et le sujet qu’a choisi Antoine
Sénanque (pseudonyme d’Antoine Moulonguet, un neurologue parisien) pour son
nouveau roman. L’auteur dépressif de « Blouse »,
dont nous avions déjà parlé, raconte ici la vie dans un service de
neurochirurgie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière avec ses mesquineries et ses
rivalités. Une nuit au bloc, il y aura une erreur médicale. A qui la faute et
qui doit en porter la responsabilité ? Ce livre a reçu le prix Jean
Bernard 2007.
[retour haut de page]
Site édité par le Docteur Christophe TRIVALLE
Cette
page est dédicacée à ma
grand-mère Paulette
qui
est décédée le 8 juillet 2007
et
qui adorait la lecture
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